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Alimentation : vers un indicateur environnemental des produits

Réchauffement climatique et perte de biodiversité obligent, les consommateurs attendaient une note de l’impact environnemental de leur alimentation, sur le modèle des scores nutritionnels. Une première étape a été franchie, avec la publication d’une énorme base de données. Nommée Agribalyse, elle fournit des indicateurs environnementaux pour environ 200 produits agricoles et 2 500 aliments. Décryptage.

La base de données Agribalyse (1), gratuite et ouverte à tous mais complexe à interpréter, est plutôt destinée à aider les filières agricoles et agroalimentaires à améliorer leurs pratiques. Elle utilise la méthode d’Analyse du cycle de vie (ACV) pour calculer 14 indicateurs (lire l’encadré) qui prennent en compte toutes les étapes « du champ à l’assiette » (production, stockage, pertes, transformation, transport…). Plus le score global est faible, moindre est l’impact environnemental. En moyenne, l’étape la plus coûteuse en termes environnementaux est la production agricole, qu’il s’agisse de produits agricoles ou d’aliments transformés.

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Dans le chili con carne, l’étape la plus impactante sur l’environnement est de loin (94,2 %) la production agricole des différents ingrédients.

 

La base permet aussi de comparer les aliments bruts et cuisinés, et sensibiliser ainsi les consommateurs au coût que représente par exemple une cuisson.

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Le poids environnemental double entre une carotte crue et une carotte après cuisson.

 

Pour un aliment standard – par exemple une pizza margherita, la plus consommée en France –, ces indicateurs évaluent l’impact de chaque étape de fabrication, mais aussi le poids respectif de chaque ingrédient dans la recette. Dans la pizza, c’est le fromage qui dégrade l’indicateur global. Des approximations ont été nécessaires, comme faire un mix des différentes origines, et considérer uniquement les origines prépondérantes (ainsi, la tomate standard utilisée dans la pizza sera considérée provenant de France, Espagne et Italie, et les autres origines – Maroc, Chine… – seront négligées), ou un même « emballage type ».

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Dans une pizza margherita, le fromage pèse pour plus d’un tiers de l’impact des ingrédients.

 

Ces indicateurs permettent d’évaluer les gains environnementaux en cas de changement de pratiques par les agriculteurs ou les fabricants. Ainsi, il sera possible de comparer deux plateaux-repas différents à la cantine… Ou de tester des pistes d’écoconception, comme changer les ingrédients d’une recette ou leur mode de production, leur emballage, etc.

En revanche, il va être plus hasardeux de s’en servir pour comparer des types de produits entre eux. En effet, faute de données scientifiques assez robustes, Agribalyse n’intègre pas (ou pas assez) d’enjeux tels que :

  • la biodiversité (flore et faune) ;
  • le stockage-destockage de carbone dans les sols (en particulier dans les prairies, ce qui désavantage fortement les élevage extensifs) ;
  • l’impact des pesticides sur la santé humaine et celle des écosystèmes ;
  • la consommation d’eau par l’agriculture ;
  • l’état des stocks des espèces marines.

La comparaison entre produits conventionnels et produits biologiques n’est donc pas possible en l’état, car les pratiques les plus favorables au mode de production biologique ne sont pas assez prises en compte. De même, les élevages herbagers, extensifs, de plein air… affichent des notes beaucoup plus mauvaises que les élevages hors-sol intensifs du fait d’une moindre productivité à l’hectare ou à l’animal, car l’unité de calcul – par kilo d’aliment – offre une « prime à l’intensification ».

Les viandes voient sans surprise un score très dégradé, en particulier les viandes de bœuf et d’agneau (souvent élevés en partie au pâturage ou en systèmes extensifs), y compris par rapport à des plats préparés. En revanche, les viandes de volailles (souvent produites en systèmes hors-sol) affichent un impact faible.

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La différence de score environnemental entre viande rouge (ici l’agneau) et viande de volaille est considérable.

 

Par ailleurs, ces indicateurs étant établis par famille de produits, et non par produit et par marque (contrairement au Nutri-Score par exemple), il n’est pas possible de comparer deux produits en rayon, comme deux yaourts aux fruits de marques différentes. Enfin, pour un même plat préparé – comme notre pizza margherita –, la nature, l’origine et la quantité des différents ingrédients sont très variables d’une recette à l’autre : un indicateur construit sur des données moyennes a alors peu de pertinence.

Néanmoins, Agribalyse est une base de données évolutive, qui sera enrichie au fur et à mesure des progrès scientifiques. Il est déjà possible de la coupler avec un indicateur de qualité nutritionnelle (même référentiel de produits). En revanche, le bien-être animal ou le commerce équitable ne sont pas pris en compte.

LES 14 CRITÈRES D’AGRIBALYSE

Les indicateurs environnementaux utilisés par Agribalyse sont préconisés par la Commission européenne. Ils sont au nombre de 14, complétés par un indicateur global (pondération des 14 indicateurs).

  • Changement climatique.
  • Particules fines.
  • Épuisement des ressources en eau – en tenant compte de la rareté selon le pays (en m3).
  • Épuisement des ressources énergétiques non renouvelables : charbon, gaz, pétrole, uranium…
  • Usage des terres, reflétant la dégradation des sols liée à l’activité humaine.
  • Épuisement des ressources en minéraux non renouvelables (cuivre, potasse, terres rares, sable…
  • Appauvrissement de la couche d’ozone.
  • Acidification.
  • Radiation ionisante, effet sur la santé, qui correspond à l’impact des déchets radioactifs issus de la production d’électricité par les centrales nucléaires.
  • Formation photochimique d’ozone, correspondant à la dégradation de la qualité de l’air (smog).
  • Eutrophisation terrestre : enrichissement excessif en nutriments, en particulier en azote, des sols agricoles.
  • Eutrophisation marine : enrichissement excessif en nutriments, en particulier en azote, des mers et océans, se traduisant pas des proliférations d’algues et des « zones mortes » sans oxygène.
  • Eutrophisation en eau douce : enrichissement excessif en nutriments, des milieux naturels et des eaux continentales (rivières, lacs…) se traduisant pas des proliférations d’algues et des « zones mortes ».

(1) http://app.agribalyse.fr/?order=alph_asc

Elsa Casalegno

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