Mediator : condamnation confirmée au civil
La responsabilité des laboratoires Servier a été confirmée par la cour d’appel de Nîmes dans le dossier d’une cinquantenaire opérée du cœur après 7 ans de Mediator. Elle recevra une indemnisation d’un peu plus de 140 000 €.
Un procès du Mediator peut en cacher un autre ! Alors que le tribunal judiciaire de Paris accueille jusqu’en avril le procès pénal pour y juger, entre autres, les laboratoires Servier et l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), la cour d’appel de Nîmes vient de rendre un arrêt confirmant la condamnation au civil du fabricant du médicament dans le cas d’une cinquantenaire ayant subi le remplacement en 2010 d’une valve cardiaque, après 7 ans de Mediator (benfluorex). La défectuosité du produit a été reconnue par les juges et par conséquent, la responsabilité des laboratoires Servier dans les dommages rapportés par la victime. Ils devront lui verser 140 936 € d’indemnisation, qui s’ajoutent aux 16 237 € obtenus de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (Oniam).
La cour d’appel a conforté la victime sur quasiment tous les points déjà validés en première instance par le tribunal de grande instance d’Avignon. Il n’y a dans son dossier aucune trace de pathologie cardiaque avant 2006, date à laquelle un examen décèle une première insuffisance de la valve mitrale : c’est donc bien le Mediator, qu’elle prend depuis 4 ans pour perdre les kilos de ses grossesses, qui est la cause de la valvulopathie qui s’aggrave par la suite, au point de nécessiter une opération du cœur et l’installation d’une valve mécanique. Les laboratoires Servier ont eu beau assurer qu’ils n’avaient pas connaissance des effets délétères de leur spécialité, le tribunal a estimé qu’à compter du milieu des années 90, la similarité du benfluorex avec d’autres anorexigènes écartés du marché pour des raisons de sécurité ne faisait plus aucun doute, et que la position des autorités de santé et de pharmacovigilance « ne dispensait pas [la société Servier] de prendre elle-même les mesures propres à s’assurer de l’innocuité du produit qu’elle commercialisait et à mettre un terme sans délai à ses effets toxiques ».
Si le Mediator avait été retiré du marché à ce moment-là, la victime n’aurait jamais pu s’en voir prescrire et délivrer, et son cœur serait sans doute intact. Un constat amer qui s’applique à des dizaines d’autres victimes du médicament, dont certaines sont aujourd’hui décédées.
Anne-Sophie Stamane